• Chapitre 1 : Le début des ennuis

     

    Prologue : Vie quotidienne

    Voilà, la journée commence à peine et j'ai déjà des ennuis. Entre Jun (le chien de ma seour) qui me bave dessus et ma mère qui me renverse du café sur la jambe, je suis servie. Et Amanda qui doit m'attendre à l'arrêt de bus ! J'espère que je vais réussir à trouver ma jupe de rechange... Et puis mince, j'y vais en pantalon, j'expliquerai la situation à mes professeurs une fois là-bas. En passant, je regarde les photos accrochées un peu partout dans ma chambre. Si seulement je pouvais être aussi jolie que ces filles... Oublions cette idée. Je dévale l'escalier à toute vitesse, attrape un bagel dans la cuisine et part mettre mes chaussures.

    _Tu y vas déjà ma chérie ?, me demande ma mère en serrant sa cravate. Tu n'as pas déjeuné !

    _J'ai déjà perdu trop de temps. Dans le pire des cas, si j'ai faim, je m'achèterais un truc à la cafétéria du lycée.

    _Ce n'est pas bon pour toi de manquer le petit déjeuné.

    _Je sais, mais c'est juste pour cette fois. Je file, je vais être en retard. Bisous.

    _À ce soir mon coeur.

    Je sors illico de la maison et commence à courir vers l'arrêt de bus. Amanda est assise là, son sac de marque posé sur ses genoux. Elle est splendide : on croirait un mannequin ! Je m'approche et la salue. Elle me regarde à peine et monte dans le bus sans m'attendre lorsque celui-ci arrive. J'ai l'habitude qu'elle me traîte avec mépris. Je pense que c'est ça façon à elle de me montrer qu'elle m'aime bien. Je reste debout tandis qu'elle s'assoit à une place pour personnes âgées. Une vieille dame la regarde en soupirant. Je retiens un "désolée", de peur qu'Amanda ne se fâche. Quand nous arrivons, une fille blonde et immense se précipite vers nous et attrape Amanda par les épaules.

    _Il faut à tout prix que je te dise un truc !

    _Lâche-moi et dis-le.

    _Tu vois qui est Eliot ?

    _Le Eliot ? Le plus beau garçon du lycée ?

    _Celui-là. Et bien, une nana est allée lui parler ce matin, en privée, et quand ils sont revenus, ils se tenaient la main.

    _C'est quoi le nom de cette salope ?

    _Aucune idée. Je crois qu'elle est en terminal ou quelque chose du même goût.

    Super. Elle va être d'une humeur massacrante toute la journée. Tu aurais pû la fermer, blondasse, c'est moi qui souffre après. Bon, il est temps d'aller devant la salle.

    _Amanda ? On va arriver en retard au premier cours...

    _Si tu étais arrivée plus tôt tout à l'heure, j'aurais le temps pour papoter.

    _Promis, ça ne se reproduira plus. Allons-y maintenant.

    _Bien... À plus tard, Marie.

    _On se vois à la récrée.

    Et voilà, des rumeurs courent déjà sur Alessandra et moi. S'ils savaient. Elle ne m'a pas fait de déclaration : elle m'a simplement demandé conseil pour sa relation avec Jason, son copain. Je lui ai répondu que si elle voulait, je pouvais l'accompagner pour le voir. Lui et moi, on est sortis ensemble l'année dernière, aussi je le connais bien. Il tient beaucoup à elle, il ne veut surtout pas la perdre. Mais il s'y prend mal pour lui faire comprendre. Comme elle ne se décidait pas, je lui ai pris la main pour l'obliger à venir. Jason va me haïr quand il va savoir ce qui se dit. J'ai pas fini d'en baver. En allant vers le batîment où j'ai cours, je vois deux filles arriver. L'une d'elle se trimballe en bottines à talons et des accessoires de marques, tandis que l'autre est tout ce qu'il y a de banal. Je dois cependant avouer qu'elle n'est pas laide, contrairement à miss bottines. Cette dernière me jette un regard noir en passant, mais je lui tiens quand même la porte. Elle ne daigne pas sortir un mot. La petite ronde, elle, en revanche, prend le temps de me regarder.

    _Merci...

    _Mais je t'en prie.

    Elle se dépêche de rejoindre son amie. Elle ne doit même pas savoir qu'elle n'est qu'un faire-valoir à ses yeux. Je vais me mettre en retard si ça continue. Une fois devant ma salle, un pote à moi me fait signe de l'autre bour du couloir. Après avoir salué les gens avec qui il discutait, il me rejoint.

    _Salut, Eliot.

    _Salut. C'était qui ?

    _Des types de ma classe d'histoire. On est censés faire un travail de groupe et j'ai dû leur donner des pistes à suivre pour qu'ils soient efficaces.

    _Tu vas encore faire le travail seul...

    _Que veux-tu ? Je me retrouve toujours avec des idiots, et je ne tiens à me taper une sale note.

    _Mouais.

    J'ai surtout l'impresssion qu'ils s'en sont rendu compte et qu'ils en profitent pour l'exploiter.

    _Dis, Paul...

    _Mmh ?

    _T'as personne en ce moment ?

    _Et non. Sandra m'a largué il y a une semaine, je t'en avais parlé.

    _C'est surout que ça ne semble pas avoir eu d'effet sur toi.

    _Bah, je ne l'aimais pas vraiment. J'avais de la sympathie pour elle, mais pas de vrais sentiments. Fallait que ça finisse un jour.

    _Mmh...

    _Pourquoi tu voulais savoir ça ?

    Pour savoir si j'avais ma chance. Pour savoir si ça poserai problème à quelqu'un si je t'embrassais genre maintenant.

    _Pour rien. Un élan de curiosité.

    _T'es bizarre ce matin ! Qu'est-ce qui t'arrive ?

    _Rien.

    _T'es sûr ?

    _Je te dis que c'est rien.

    _Ok, ok, si tu le dis. Mais si tu veux parler, tu sais que tu peux tout me dire.

    _...

    Tout sauf mes sentiments. Je fais partie de ces gens qui donnent sans arrêt des conseils aux gens en couple mais qui n'arrivent pas à avancer dans leurs propres relations. Il faut entrer en salle. Je déteste les cours de français.

    C'est enfin la récrée ! Je crois bien que ma mère est devin. Mon ventre s'est mis à gargouiller furieusement au début de la deuxième heure. Direction la cafèt' ! Que prendre... Rien de trop lourd, histoire que j'ai encore de l'apétit ce midi, mais rien de trop léger non plus, je ne tiens pas à m'évanouir pendant un cours. Va pour un café et deux muffins au chocolat ! Je m'installe à une des tables les plus éloignées de l'attroupement d'élèves qui se forme. J'ouvre mon cahier de SVT et commence à relire la précédente leçon, au cas où je serai interrogée. Mais bon, les profs ne font jamais attention à moi : ils ne m'interrogent jamais, même quand je suis la seule à lever la main.

    _T'as vu cette fille ?

    _Déjà qu'elle ne porte pas l'uniforme complet... Elle se permet de se goinfrer !

    _Elle arrange pas son cas !

    _Les baleines sortent le jean cette année ?

    Ils pensent que je ne les entends pas, mais ils se trompent. Ils ignorent aussi que je suis devenue imperméable à ce genre de remarques. Elles glissent sur ma peau et tombent au sol sans avoir pu me faire le moindre mal. Je me replonge dans ma leçon en buvant une gorgée de café. J'adore quand il est bouillant, ça me donne l'impression que je vais fondre et disparaître. Mais, à mon grand désespoir, je ne suis pas en sucre. La sonnerie rententit. J'ai pas fini de manger. Bah, je l'engloutirais sur la route pour la salle. J'avale mon cfé d'un trait et jette mon gobelet à la poubelle. Un type me percute en se marrant.

    _Oups, pardon, t'es tellement petite que je t'avais pas vue.

    _T'es sûr que c'est pas ton cerveau qui est trop petit ?

    _Répète !!

    _Je sous-entends seulement que t'es trop con et narcissique pour faire attention aux gens.

    _Ferme-la où je te nique !!

    _T'oseras pas : je nuirais à ta réputation !

    Il s'apprête à me donner une claque quand une surveillante intervient.

    _Qu'est-ce qui se passe ?

    _Elle m'a traîté de con.

    _C'est toi qui m'a bousculée exprès puis traîtée de naine.

    _Bon, puisqu'on ne peut pas savoir qui a commencé, on va dire qu'il ne s'est rien passé. Si je vous reprends à vous battre tous les deux, ça va finir chez M. le directeur.

    _Bien, mademoiselle.

    _Ouais, c'est ça...

    Il s'en va en me lançant un regard qui veut dire "je t'ai à l'oeil" ou encore "tu vas souffrir la prochaine fois". Il ne m'impressionne pas. Mais je dois avouer que je me suis laissée emporter. Faut que je me ressaisisse. Direction la salle.

    Si j'avais su qu'elle avait un caractère comme celui-là, je crois que j'aurai pas osé lui parler ce matin. Pour une petite, elle sait se défendre ! Je dois avouer que j'ai manqué de m'étrangler avec mon milk-shaje quand j'ai reconnu sa voix. Paul, lui, n'a pas compris ce qui se passait mais m'a aidé à m'essuyer la bouche.

    _Qu'est-ce qui t'a pris ?

    _R-Rien...

    _Tu le dis souvent depuis ce matin. Si tu te sens mal, je peux t'accompagner à l'infirmerie.

    Et prendre le risque que je le viole ? Y a pas moyen.

    _Nan, c'est bon, t'inquiète.

    _Quand même, on peut dire qu'elle a du caractère celle-là ! Je pensais qu'elle allait l'ignorer et passer son chemin, comme elle fait d'habitude...

    _Tu la connais ?

    _C'est la souffre-douleur d'une amie de ma frangine. Le midi et pendant les pauses, il m'arrive de l'observer.

    _Elle te plaît ?

    _Pas spécialement, mais bon. Avoue-le : elle est pas désagréable à regarder !

    _Tu sais parfaitement que je ne peux pas être impartial. Allons en salle, je commence à prendre racine.

    _Rôooh, prends pas la mouche comme ça !

    Je prends pas la mouche, je commence simplement à me demander combiend de temps je pourrais encore me retenir. Pas très longtemps... Si au moins il faisait un coming-out, là j'aurai plus de raisons de m'inquièter. Mais non, il est hétéro. Je hais celui qui a décidé de son orientation sexuelle. Une fois assis à ma place, je commence à dessiner quelques trucs sur une feuille volante. Une neko, un chien, des fleurs... Le prof prend son temps, j'ai horreur de ça. Quand il entre, le silence se fait et cache ma feuille sous mon cahier. Sans trop m'en rendre compte, je reprends mon stylo et recommence à dessiner mais cette fois sur ma page de cours. Merde, merde, merde !! Si le prof voit ça, je suis un homme mort ! Je tourne rapidement quelques page avant qu'il n'arrive au niveau de ma table.

    _Et bien, que vous arrive-t-il Eliot ? Vous ne trouvez plus votre cours ?

    _Je crois que je me suis trompé de cahier.

    _Bon, c'est la première fois, ça passe, mais seulement aujourd'hui.

    _Merci, m'sieur.

    Je l'ai échappée belle. Paul me fait signe que je suis un sacré veinard. Essayons de suivre ce fichu cours, ensuite on pourra parler.

    Oeufs durs mayonnaise, pâtes au beurre, galettes de pommes de terre, cordon bleu, kiri, flan au chocolat, pain. Menu complet et délicieux. Je crois que je n'aurais pas faim avant le prochain repas. J'ai perdu Amanda de vue avant de venir au self, du coup je mange seule. Mais bon, au moins je ne l'entendrai pas jacasser sur son Eliot. Pourquoi je dis "son" ? Il ne lui appartient pas ! Je crois qu'elle commence à avoir une mauvaise influence sur moi. Mmh... Ces galettes sont vraiment les meilleures... Après avoir débarassé mon plateau, je monte au CDI, mon petit refuge. La documentaliste me dis bonjour en souriant. Je lui rends son sourire avant d'aller au rayon manga. Il est plus fourni que celui de la bibliothèque, c'est pour ça que je préfère lire au lycée : il y a plus de choix. Après avoir attrapé le premier tome d'une nouvelle série, je m'installe dans un coin de la pièce, le dos contre le bord d'une étagère. J'entends alors des voix. Des garçons. Ils discutent. Je me déplace un peu pour mieux entendre. Ma curiosité conjuguée à mon amour du yaoi représente une arme de destruction massive.

    J'aime bien ce rayon du CDI, d'un parce qu'il sent les vieux livres, de deux parce qu'il est isolé des autres. Paul s'assied en face de moi et ouvre son livre de chimie pour réviser. Le contrôle est dans une semaine, mais il connaît sans doute déjà son cours par coeur. En lisant, il lèche légèrement sa lèvre supérieure. Par mimétisme, j'en fais de même. Je devrais avoir honte ! Je l'observe sans qu'il se doute de rien, sans arrêt. Si lui n'a pas encore remarqué mon petit manège, les autres ont du s'en rendre sompte depuis bien longtemps. Attrapant une feuille et mon crayon, je commence à le dessiner, plongé dans ses pensées. Puisqu'on en parle : à quoi songe-t-il en ce moment ? Sans doute uniquement au contrôle. Je refait plusieurs portraits de lui avant de me lasser. Il remarque mon manque d'activité.

    _Tu n'as plus beaucoup d'entrain pour dessiner en ce moment.

    _Ouais, je sais pas ce que j'ai.

    _Tu es peut-être malade.

    _Tu tiens tant que ça à m'amener à l'infirmerie ?

    _Non... C'est juste que je m'inquiète.

    _...

    _Au fait... Je n'osais pas te le dire, mais depuis plusieurs jours, j'ai l'impression que je suis observé... Toujours quand je suis au lycée.

    _Ah...

    _Et le début de cette sensation correspond au moment où tu as commencé à être bizarre.

    _Pure coincïdence.

    _Tu as raison !

    Merde... Il s'est rendu compte d'un truc, mais pour lui, il est impossibe que j'en sois responsable. Je me lève quelques secondes et m'assois à côté de lui. Il me jette un bref regard avant de continuer à lire.

    _C'est vrai que mon état t'inquiète ?

    _Bien sûr ! Tu es le meilleur ami que j'ai jamais eu, forcément j'ai peur qu'il t'arrive quelque chose.

    _Ton meilleur ami...

    _Pardon d'insister, mais tu es vraiment bizarre en ce moment.

    Je ne l'écoute pas et pose ma tête contre son épaule en fermant les yeux. J'ai peur. Peur de sa réaction. Peur de ce qui arrivera ensuite. Peur qu'il me déteste. Peur de le perdre. Mais il faut que je le fasse. Je me redresse et commence un compte à rebours. 3...2...1 !

    _Je peux te demander un truc ?

    _Je t'écoute.

    _Ferme les yeux une dizaine de secondes.

    _Pourquoi ?

    _...

    Il me regarde, encore un peu étonné, puis hausse des épaules avant de fermer ses beaux yeux chocolat. Doucement, de manière calculée, je me place face à lui, de sorte à ce qu'il me suffise de me pencher pour l'embrasser. J'hésite un peu, mais prends mon courage à deux mains et avance doucement ma tête. Nos lèvres se touchent une seconde puis je commence à me reculer. Ses mains attrapent le col de ma chemise et il me force à recommencer. Je ne tiens plus et l'embrasse passionément. Je ne laisse à ses lèvres aucun moment de répit. Enfin, je le lâche, avec la singulière impression d'avoir fait une connerie. Il me regarde, tout rouge, en reprenant son souffle. Au bout d'un moment, il me fait un grand sourire.

    _Depuis le temps que j'attendais...

    _Hein ?!

    _Je savais bien que c'était toi qui m'observais.

    _Mais... Pourquoi t'as rien dit ?

    _Bah, tu le sais : je ne me déclare jamais en premier.

    _Idiot...

    _Je sais...

    Je m'apprête à l'embrasser de nouveau lorsque j'entends un gros "boum" suivit d'un "aïeuh !" pour le moins bruyant.

    Si je m'y attendais ! Eliot, le beau gosse du lycée, embrassant Paul, le garçon intello mais craquant par excellence !! Gyaah, ma nature de fangirl prend le dessus ! Faut que je voie plus ! En me penchant, je pose ma main sur une pile de magazine. Merde. Je glisse et m'étale par terre comme une loque.

    _Aïeuh !

    Je les regarde. Ils me reagrdent. Avec des yeux ronds. Je fais un vague sourire.

    _Désolée, je voulais surtout pas vous déranger...

    Je commence à retourner de mon côté du rayon. Là, je sens une main m'attraper par la jambe. Eliot.

    _Tu penses aller où comme ça ?

    _Juste reprendre ma lecture...

    _Si tu oses répendre des rumeurs, je te préviens que je...

    _Je comptais pas en parler, figure-toi ! Je ne suis pas assez populaire pour lancer des rumeurs, et je ne parle pas de ce genre de choses avec mes amis, donc ça restera secret ! J'peux y alller maintenant ?

    _Laisse-la, Eliot. Si elle le dit, autant lui faire confiance. Dans le pire des cas, tu sauras qui aller voir si des rumeurs se répandent.

    _...

    _Pliiize...

    _Bon, d'accord. Mais y a intérêt à ce que tu te tiennes tranquille.

    _Merci...

    Je m'en vais précipitemment, en récupérant mes affaires au passage. Mon dieu, mon dieu, mon dieu mon dieu !! J'en reviens pas !! Je sors vite et pars directement devant la salle de mon prochain cours. Il n'y a personne à cette heure-ci, du coup je peux fantasmer en paix. Je pourrais plus jamais les regarder en face tous les deux !

    Après qu'elle soit partie, j'ai réalisé ce qui cétait passé avant son intervention. Portant ma main à mes lèvres, je suis tenté de m'en aller aussi, mais Paul passe ses bras autour de mon cou. Je le regarde, interloqué. Il a toujours les joues aussi rouges.

    _C'est dommage que tu l'ai remarquée...

    _Pourquoi tu dis ça ?

    _Si tu ne l'avais pas vue, tu m'aurrais de nouveau embrassé.

    _Il suffit de demander.

    Je l'embrasse, me laissant submergé par la vague d'émotions qui m'envahit. La sonnerie retentit, à mon grand regret. Nous restons collés l'un à l'autre pendant quelques instant avant de partir. Mon coeur refuse de se calmer. En attendant devant la salle, il attrape ma main et en regarde les traits.

    _C'est marrant.

    _De quoi ?

    _Quand on s'est rencontrés, la première chose que j'ai vu de toi, c'est ta main.

    _Et ?

    _...

    Il me regarde l'air de dire que je sais parfaitement la suite.

    _Disons qu'elle va être rapidement utile... Et que je risque de la regarder encore plus souvent qu'avant.

    Je rougis et mets précipitemment mes mains dans mes poches. Merde, s'il continue à me dire des choses comme ça, je sens que je vais pas pouvoir me retenir. Faudra que je lui en touche deux mots. Nous entrons en salle et je me retiens de dire que je me sens mal. L'infirmerie serai le meilleur des refuges sans l'infirmière.

    En rentrant à la maison, après avoir raccompagnée Amanda chez elle, je me suis dis que la vie réservait de drôles de surprises. Je prends un rapide goûter dans la cuisine puis monte dans ma chambre. Je fais le tour de mes devoirs en une demi-heure. L'instant tant redouté de la journée arrive. Je m'installe à mon bureau, allume mon ordinateur et me connecte aux différents résaux sociaux auxquels je suis inscrite. J'ai des notifications. Voyons voir ça...

    "Trop la classe ce dessin !"

    "Franchement, en connaissant la chanson dont tu t'es inspirée, je m'attendait pas à un si bon résultat !"

    "Dis-moi que tu utilises de la poudre magique pour que ça soit si beau !!"

    "Je pense que ça devrait être illégal de savoir dessiner aussi bien."

    Je souris en lisant tout ces gentils commentaires. Je m'attendais à ce qu'on me dise que c'était joli tout au plus, mais pas à ce qu'ils développent autant. Soudain, je vois un commentaire d'un autre genre. C'est le dernier posté.

    "Tu devrais chercher un travail au lieu de passer ton temps à gribouiller ! Tes études et ta vie future sont plus importants que de bêtes dessins sans intérêts !! Et puis c'est laid, mais au possible ! T'as pris des cours avec ma petite soeur ou quoi ?!"

    Mon coeur se serre dans ma poitrine. C'est toujours le même qui dit ça. Il n'arrête pas : à chaque dessin que je poste, qu'il soit finit ou non, il me dit que c'est moche et que je ferai mieux d'étudier. Il a même déjà signalée ma page une fois. Mais comme je n'avais rien à me reprocher, je n'ai pas été obligée de fermer. Une larme perle au coin de mon oeil, mais je l'essuie tout de suite. Un effet sonore m'indique qu'un nouveau commentaire vient d'être posté. Je regarde. C'est une réponse au précédent.

    "Tu mets le même commentaire sur tous ses dessins ! Espèce de troll ! C'est toi qui devrais trouver un truc mieux à faire !"

    Plusieurs effets sonores se succèdent et les commentaires fusent.

    "Si c'est vraiment ta soeur qui lui a donné des cours, alors ta soeur est une artiste"

    "Elle est étudiante, elle l'a marqué sur la description de sa page ! Et c'est déjà arrivé qu'elle poste des photos de ses examens : ses notes sont toujours excellentes !"

    "Sans vouloir être trop diplomate, le dessin n'est pas inutile, il permet même à certaines personnes de vivre ! Tu ne l'ignores sans doute pas, mais plusieurs des grands auteurs de BD et de manga on d'abord été des "gribouilleurs" selon tes termes. Je n'ai qu'une chose à ajouter : ForABetterLife, tu as un grand avenir !"

    "Personnellement, je pense la même choses de certaines personnes, mais dans son cas à elle, tu as tort. Elle dessine bien et ça ne prend pas une place trop importante dans sa vie. Y a pas de quoi fouetter un chat et donc pas de quoi critiquer."

    "J'ai une idée ! Spamons-le !! Non, encore mieux : on va le signaler ! Pour fausses accusations, insultes et harcèlement !!"

    Ouhlà, celui-ce, si je ne le calme pas, il serai capable d'inventer un procès. Je rédige rapidement un petit texte pour les remercier et leur indique que ce n'est pas la peine d'aller jusqu'à le signaler. Chacun son avis, après tout, et si mes dessins le dérangent, c'est son problème. Je reçois un flot de compliments pour ma sagesse et beaucoup me disent que je devrais quand même faire quelque chose un jour où l'autre. J'aimerais, s'ils savaient comme j'aimerais. Mais je suis beaucoup trop gentille pour ça.

    Depuis qu'on s'est quittés à la sortie des cours, Paul et moi avons échangés au moins 500 sms, tous remplis de mots d'amour. Mon père ne va pas en revenir quand je vais lui annoncer la nouvelle ! Quand j'arrive à la maison, je le trouve, comme d'habitude, assis au burrau du salon, en train de calculer je ne sais quoi. Je lui fais une bise sur la joue, il sursaute.

    _Désolé, je voulais pas te faire peur.

    _C'est rien... J'ai épluché des comptes toute la matinée, j'ai pas vu le temps passer. T'étais pas censé manger au self ce midi ?

    _Papa, il est quasiment 18h30.

    _Je comprends mieux pourquoi j'ai si faim. Puis-je compter sur tes talents de cordon-bleu pour me mijoter quelque chose ?

    _T'es pas possible.

    _Je sais. Des pâtes et un steak suffiront.

    _Tu ne manges que ça, c'est étonnant que tu sois si maigre.

    _Avec seulement deux repas par jour, il y a de quoi.

    _Si ça peut t'arranger, je peux venir le midi pour te préparer un truc vite fait avant de retourner au lycée.

    _Et risquer que tu prennes un retard ? Non, non, continue à manger au self.

    _Paul et moi on sort ensemble.

    _Ah oui ? Bonne nouvelle... Pardon ?!

    _I'm in a relationship with Paul.

    _No.

    _That's real !

    _That's a joke.

    _No, no ! We are really dating !

    _Amazing ! Amazing day, amazing boy, amazing choice !

    Il me prend dans ses bras puis me décoiffe. Quand j'étais petit aussi il faisait ça. D'ailleurs, dès tout jeune, il m'a appris que tous étaient égaux, quelque soit la religion, la couleur de peau ou l'orientation sexuelle, même le sexe d"un personne n'a pas d'importance. Ce qui compte c'est la personnalité, ce qui fait que cette personne est unique. Quand je lui ai dit que j'étais gay, il n'a pas fait de commentaire, il m'a juste souris et décoiffé. Quand je lui ai présenté mon premier copain, il n'a pas arrêté de lui parler comme à un ami, comme il me parle à moi. Jusqu'ici, c'était le seul à être au courant de mes sentiments pour Paul que je connais depuis le primaire. Il était d'ailleurs impatient qu'on sorte ensemble. Pour lui la possibilité qu'il me rejette était inenvisageable. Il retourne s'installer à son bureau et se replonge dans ses calculs. Je finis par commencer à préparer à manger, sachant bien qu'il ne prêtera de nouveau attention au monde extérieur qu'une fois que ce sera prêt. Je lui apporte une assiette et m'installe sur le canapé pour manger. D'un coup, il se lève et s'installe à côté de moi. Ce n'est pas dans ses habitudes.

    _Fils, j'ai moi aussi quelque chose à t'annoncer.

    _Mais vas-y, je t'écoute.

    _Voilà... Comme tu le sais déjà, je vois une femme. Quelques fois par semaine, on se retrouve et on parle, comme on fait d'autres choses - tu vois de quoi je veux parler.

    _Mmh...

    _Eh bien... Il s'avère que j'aime vraiment beaucoup cette femme, et qu'elle m'aime aussi beaucoup en retour. Nous avons donc pris la décision de devenir plus que des amants.

    _Vous allez vous marrier ?!

    _Oui. Euh ! Non ! Enfin, pas tout de suite. On s'est surout dis qu'il fallait que les enfants de chacun fassent connaissance avec ceux de l'autre.

    _T'es en train de me dire que je vais faire la connaissance de son gosse.

    _Ses. Elle a deux filles. Une de 15 ans et une de 11 ans.

    _Okay... Et sinon, t'as un autre truc à me dire ?

    _La rencontre aura lieu ce week-end.

    Chapitre 1 : Le début des ennuis

     


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